FESTIVITES D'ABALESSA DU PATRIMOINE IMMATERIEL, le destin d'un mythe
De défilés en parades traditionnelles, les habitants de Tamanrasset sont à la fête depuis plusieurs jours. Et la fête se prolonge plus encore puisque, en parallèle aux festivités d’Abalessa, s’enchaînent celles du festival dédié à la réhabilitation du tindi, organisé par l’association Issekta en partenariat avec la Maison de la culture. Autre événement très attendu, l’Assihar, cette manifestation commerciale mais tout autant culturelle, puisqu’elle réunit un bon nombre de troupes folkloriques de pays voisins, tels que le Mali et le Niger, ouvrira ses portes aujourd’hui.
De Tamanrasset, Samira Hadj Amar Véritable carrefour de spectacles et des arts traditionnels, le cœur de Tamanrasset bat aux mêmes rythmes des sons engendrés par l’Ahlelil du Gourara et celui des voix féminines de l’Imzad. Au-delà des conflits de leadership qui semblent s’installer autour du monopole de la gestion de ce patrimoine universel, l’esprit demeure aux réjouissances ! Au deuxième jour des festivités d’Abalessa, le programme s’allonge et se prolonge en un périple ancestral. Première halte. Visite des campements traditionnels. Au pied des montagnes de l’Ahaggar, une belle perspective s’ouvre vers un horizon de traditions et de rituels. Une suite de kheïmas installées les unes à côté des autres entourent le centre des courses fabuleuses des méharistes. Ce sont toutes des représentations d’associations culturelles de la région. Un réel plaisir que d’admirer ces danses folkloriques accompagnées des rythmes saccadés du Tindi. Aux premières heures de cette journée très ensoleillée, la lumière scintille de plus beau sur les robes et bijoux traditionnels des femmes du désert parées de leurs plus beaux atours. Les belles aux yeux de gazelle s’affairent à offrir aux visiteurs un miroir de leur quotidien. De l’alimentaire aux douces mélodies en passant par l’artisanat, les touaregs racontent et livrent quelques secrets de leurs mystères aux plus sceptiques. Un thé dans la plus pure des traditions est offert à chaque arrêt. Quelques mots échangés dévoilent certains problèmes rencontrés par des associations, notamment celles de l’Imzad. Une question de financement par l’Unesco qui tarde à venir ou qui serait mal réparti. Qu’a cela ne tienne, les détenteurs de l’Imzad affichent bonne figure en attendant des jours meilleurs mais refusent d’adhérer au concept de l’école fondée par l’association «Sauver l’Imzad». Pour ses représentantes comme Chenna, la plus âgée des chanteuses, qui a refusé d’intégrer l’école de l’Imzad fondée en 2004, cet art ancestral ne s’apprend pas de cette manière. Cette musique dictée par les vents du désert ne peut se puiser entre les quatre murs d’une salle de musique, nous diton. Au royaume du silence, les visiteurs reprennent la route en direction du tombeau de la reine Tin Hinan, mère fondatrice du peuple touareg. AAbalessa, ancienne capitale de Tamanrasset, les invités remontent le temps jusqu’au IVe siècle. Pour les guider, Farid Ighil Ahriz, directeur de l’Office national de l’Ahaggar (OPNA). Au pied de la tombe, près de Silat, un petit musée s’est improvisé. «Plus tard, un modèle de l’expo Sahara réalisée en novembre dernier sera érigé ici», nous confie le directeur de l’OPNA. Des maquettes et autres répliques, découvertes dans la chambre de Tin Hinan, seront reproduites. Farid Ighil Ahriz nous annonce d’ailleurs que dans moins d’une année, un musée national sera édifié à Tamanrasset. Un musée qui regrouperait l’essentiel des découvertes de la région et qui permettrait enfin de limiter les pillages fréquents causés par les touristes étrangers. On rappellera que les ossements de Tin Hinan, découverts en 1925, sont entreposés au musée du Bardo à Alger. Le retour aux festivités se fait à Abalessa. La plateforme est bondée de monde. Toute la ville est là. Les habitants accompagnent les chanteurs et les danseurs dans leurs moindres mouvements. La musique est partout. Le temps semble figé. La fraîcheur de cette soirée n’entame en rien l’osmose parfaite qui s’est créée aux premiers refrains des poètes de l’Ahlelil. Silence solennel, pour les loueurs de proses spirituels. Un silence qui se prolonge, lorsque Chtima Bouzad avec sa petite troupe font leur entrée. Tous l’attendaient ! Sans surprise, Chtima fascine dès les premières notes. Près d’elle, son mari entonne des poésies en targui. Même si la langue nous est inconnue, nous nous laissons inéluctablement emporter par la magie de ces instants précieux. La soirée s’achève et chacun repart serein, la tête plein les étoiles !
S. H. A/Le Soir d'Algérie